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Histoire de plume, plume de lune
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24 février 2009

Le Compulseur (4)

 

A commencer par ce splendide autoportrait au crayon de Jean Huber écrivant.

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Autoportrait - Jean Huber

  Une rareté, un joyau ! Le voltairieur s’autoportraitant dans son activité d’écrivain, c’est déjà surprenant, mais que ce soit, du compulseur du moins, le seul exemple connu d’autoportrait de ce genre, et en plus d’un écrivain – epistol-po – méconnu… cela confine au miracle. Le miracle réside aussi dans le dessin lui-même : une étude pleine de simplicité et de grâce, pleine de pénétration. Voilà un dessin dans tous les sens du terme immanent : une lumière intérieure inonde le papier, les mains et le visage rehaussé d’un bandeau blanc ; c’est une luciole qui s’allume. Nul part sans doute l’inspiration n’a été évoquée ainsi, aussi proche de la respiration.
« Quelle analyse ! », vous dites-vous.
  C’est celle du compulseur. Tout ce que tu lis, ne l’oublies pas, se greffe à la pensée du compulseur. Mais ce ralentissement de l’action qui était déjà mince doit faire enrager.
« Ouais, j’ai l’impression que tu traînes de la savate, cher auteur…  Au fait, j’y pense, tout ça était sans doute nécessaire. Ton dernier tableau, enfin le dernier examiné par le compulseur, m’a turlupiné, et je me suis dit : pourquoi le compulseur ne le fait-il péter comme Voltaire ou bien l’Inspiré ? Et soudain j’ai eu la révélation : alors que les deux autres peintures donnaient l’idée du pet, ce dernier est tout pet, je veux dire le pet en personne »
Eh bien, crois moi ou non, le compulseur n’a pas pensé autrement. « Ah bon ? » Certain. « C’est extraordinaire ! » Le compulseur dirait, comme il a été dit dans la préhistoire de ce livre : c’est de la miracalogie !
Enfin ! Il faut que ce livre atomisé se remette sur pied, et pour ce faire, je te propose un nouveau pacte.
                                                    

PACTE DE BONNE ENTENTE

Tu ne perturberas plus l’auteur et l’auteur ne te fera plus d’ânerie.

Signature d’Abraham :                                 Signature de Dieu
               
          A                                                                   Δ
      
« Et tu promets que tu ne m’entuberas pas… »

-  Promis.                            
         
  Lec-lec, nous sauterons sans préambule à pieds joints dans la galerie de portraits trouvés par le compulseur jusqu’ici incomplète bien que déjà riche, muséum exclusivement voué au thème…

- STANEF !
- QUOI ENCORE !
La mère : LA VAISSELLE !
Le fils : CH’UI OCCUPE !
La mère : QU’EST-CE QU’TU FAIS ?
Le fils : UN TRUC !
La mère : ÇA FAIT UNE HEURE QUE TU FAIS TON TRUC !
Le fils : J’EN AI PU POUR LONGTEMPS OH !
- BON BAH DEPECHE !
- Fais chier… OUAIS ! Putain, on va pas m’ lâcher…

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Intérieur où dessine un homme ou « Jean Six écrivant » de Rembrandt

  Non, le tableau ne s’appelle pas « Putain, on va pas m’lâcher… » Il s’agit du Portrait de Jan Six de Rembrandt. Je veux à mon habitude donner une idée de l’œuvre pour ceux qui ne savent pas ou ne peuvent pas le voir. Ce dessin à la plume et lavis de bistre date de la même année que son célèbre bœuf écorché : 1655. Il s’agit là d’une scène moins « choc », une scène douce et tranquille, tirée du quotidien du peintre. Un coup de crayon et de pinceau vif, allègre, croquant l’essentiel du sujet dans une simple et savante construction. Le sujet ? Un intérieur et un extérieur ; un observé et un observant, un poète et un enfant, à ce qu’il me semble. Dans un intérieur de café comme ce décor en a l’air, dépouillé, rustique est assis à une table de biais face à moi, Jan Six, ami du peintre dont il avait fait un très bon portrait à l’huile un an auparavant. Il porte sur la tête l’aussi large chapeau noir que dans cette huile où on le distingue à peine du fond obscur. Il est là, sans gants, tout absorbé par sa feuille et son encre. Ses yeux sont cachés par le chapeau qui occupe sur le dessin la largeur de la porte derrière lui. A côté, dans la direction du chapeau, deux fenêtres grossièrement esquissées laissent entrevoir un voilier, et à l’horizon une côte où s’érige un phare je crois, ce qui me fait supposer que la scène a lieu dans une petite ville au bord d’un estuaire hollandais. Le garçon qui l’épie derrière la fenêtre (à l’angle du bas le plus à droite du dessin et le plus éloigné de la main gauche de l’écrivain) ajoute de la profondeur à la scène, par une présence aussi discrète qu’énigmatique. La question de l’identité se pose à moi naturellement. Peut-être que c’est le fils de Jean Six intrigué par ce père plongé dans ses pensées, hors du monde, absent. Remarque : la table sur laquelle écrit Jean Six est presque aussi claire que le paysage extérieur. Autre remarque : le garçon n’a pas le monopole de l’observation : il y a certainement son ami peintre dans l’ombre pour le croquer. Je suis à sa place maintenant qu’il a donné sa lumière, je suis le deuxième spectateur. J’occupe un autre extérieur, temporel, réel. Je suis de passage… Et, ému, je pense à la revendication artistique de Rembrandt qui dans le portrait à l'huile de Jan Six laissa le gant que celui-ci tient en main à l’état d’esquisse : « Une peinture est achevée lorsqu’elle a atteint son but ». Là, cela a pleinement atteint son but : il me prend l’envie de péter. Je pète. Heureux les peintres qui donnent envie de péter.

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  • Stéphane Gentilhomme, 39 ans : UN POÈTE français du XX-XXIème , UN ÉCRIVAIN aux multiples quêtes (de forme et de fond) et plein d'humour. UN ARTISTE panaché qui explore l'âme et différents étages de l'être. Public Ad 90% , E, 10%)
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